Revue de presse

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… Dans la mise en scène d’Adriano Sinivia, la tragédie de Verdi est jouée dès la première note. Un Rigoletto pathétique et visiblement fou revit les étapes de sa malédiction.
Les lieux du drame ne sont plus que ruines tournant autour de douves glauques, peuplées de créatures batraciennes. Les murs s’animent de visions hallucinées.
L’inspiration du metteur en scène et l’efficacité du décor obsédant de Jean-Marie Abplanalp ne font que croître à mesure que la nuit s’installe..Jusqu’à un final éblouissant.
En quittant les arènes, la foule transie par la fraîcheur nocturne semblait parfaitement heureuse d’avoir assisté à une histoire effrayante. Et fredonnait de bon cœur la mélodie d’une chanson scélérate: la donna è mobile….Le miracle de l’opéra tient aussi à cela.

Matthieu Chenal (4 juillet 2011)

…c’est par le dénouement que tout commence dans cette lecture du Rigoletto de Verdi, à l’affiche du Festival d’opéra d’Avenches. Prostré dans des convulsions d’ombre craintive, un double gémellaire du bouffon observe les événements comme a posteriori, larmes de craie, rictus écarlate. Une manière pour le metteur en scène Adriano Sinivia de signifier les principes moteurs de la pièce. Morbidité du désir, raison et folie, rire et désespoir.

Jonas Pulver

«Rigoletto» embrase les arènes d’Avenches

Le Rigoletto présenté à Avenches apporte un renouveau bienvenu à ce grand classique du répertoire d’opéra. Distribution de grande qualité.

Le but de Verdi était de faire du beau avec du laid et du grotesque, à l’image du rôle-titre: un bouffon bossu.

Critique

L’orage menaçait à Avenches lors de la représentation de Rigoletto de jeudi. Le chef-d’œuvre de Verdi sera finalement interrompu par la pluie après le deuxième acte, juste avant le célébrissime: La donna è mobile. Les malchanceux spectateurs de la soirée ont tout de même pu savourer deux actes très réussis, avec une distribution d’une grande qualité et une scénographie bien adaptée à l’ambiance du drame.

Le metteur en scène vénitien Adriano Sinivia a choisi de situer tout l’opéra après la fin de l’histoire: ainsi, pendant l’ouverture, on découvre déjà Rigoletto égaré de douleur devant le cadavre de sa fille. Cet angle de vue apporte un renouveau bienvenu à ce grand classique du répertoire d’opéra. La perspective choisie confère une intensité dramatique plus poussée à toute l’œuvre, en présentant les deux Rigoletto à la fois: celui qui regarde, impuissant et halluciné, la scène se dérouler dans son souvenir, et celui qui la vit effectivement. La réalisation de cette interprétation est rendue possible par la troupe de cascadeurs S&C. Ils portent les personnages, qui semblent ainsi apparaître dans le cauchemar du Rigoletto déchu.

Images chocs

L’ambiance glauque s’allie à la représentation de la dépravation totale des mœurs à la cour du duc, affichée sur scène sans souci de décence. Ces images chocs conviennent bien à l’esprit de l’opéra qui relève de l’esthétique du grotesque. Dans la lignée de Shakespeare et d’Hugo (le livret de Rigoletto est d’ailleurs fondé sur la pièce Le roi s’amuse de Victor Hugo), le but de Verdi était en effet de faire du beau avec du laid et du grotesque, à l’image du rôle-titre: un bouffon bossu. Le spectacle est complété par des images vidéo qui s’insèrent dans le décor, dévoilant les projections mentales des personnages.

L’ensemble forme un écrin de choix pour les voix admirables des interprètes.

Laure Jaquier (9 juillet 2011)