Revue de presse

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Adriano Sinivia, semble touché par l’univers du cirque et inspiré par une opérette, relue avec respect et poésie. Le spectacle forain termine les deux premiers actes ; la parade amène une fanfare qui accompagne un faux chameau, une charrette ou trône le couple Malicorne, un géant, des numéros de tête coupée ou de charmeuse de serpent… L’acte II donne à voir un éblouissant ballet équestre, sur un thème de percussion. Mais le cirque n’intervient pas seulement aux moments ou l’action l’impose ; il est consubstantiel aux façons d’être des personnages, qui s’envolent, se balancent, sortent d’une malle exiguë, ou, en nombre incalculable d’une carriole baignée par le matin blême… Une fildefériste traverse la piste et Suzon chante son premier air perchée sur un praticable.
Adriano Sinivia fait revivre toute une société, celle des années 1900, échantillonnée dans le cortège des spectateurs : images savoureuses de la nourrice et du militaire, des fillettes emplumées. Son portrait de l’armée n’est pas moins réussi : conquérante dans la prouesse technique de l’engin volant, touchante dans le retour de ces fantassins à pieds ou à bicyclette se jetant dans le bras d’une femme (mère ou bonne amie), grinçante aussi (mais cette dernière image n’annulant pas les autres, contrairement à ce qu’avait fait Lavelli dans Faust) : l’hôpital de campagne ou les éclopés suivent une infirmière étrangement mécanique. C’est aussi une excellente idée que d’avoir traité les parties comiques de l’opérette sur le mode du theatre chinois et de la commedia dell’arte (bonne prestation des comédiens investis dans ce travail, notamment Yung-Biau Lin…).
On a beaucoup aimé dans cette recherche purement théâtrale la création à l’acte II du boudoir fin de siècle pendant l’air de Marion, et son évanescence avec l’air de Paillasse qui lui fait suite. Plusieurs fils rattachent ce monde éclaté du cirque, et le relient au thème de l’aventure sentimentale : un cavalier surgit, muni d’accessoires qui vont changer au cours des actes et qui symbolisent les coups du destin, drapeau martial dans les finals, carquois et flèches du Dieu Amour lorsque Suzanne et André se rencontrent, arc déglingué pour renvoyer l’image grotesque du vaudeville ; à l’acte II, le cavalier désarçonné entre seul, soulignant sans doute la situation des amants face à eux-mêmes. La parade elle aussi reprend trois fois : par deux fois le canon de cirque expulse un comparse burlesque, avant de projeter un corps mort qu’une marche funèbre, d’une signification énigmatique, accompagnera à sa dernière demeure. Enfin si l’ouverture réunissant tous les artistes faisait apparaitre un bal romantique, le final fait retentir les notes de la parade et tire le rideau.

Didier Roumilhac (avril 1995)

Le metteur en scène et décorateur, Adriano Sinivia, situe d’emblée l’atmosphère: il a installé une piste aux étoiles au centre de la salle et placé l’Orchestre national du Capitole au-dessus de l’entrée des artistes que ferme un rideau rouge.
Dans ce décor, outre des personnages et des accessoires de pure fantaisie, on applaudit de vrais numéros de cirque. Pendant leur exhibition, les tambours du Bronx martèlent un étonnant ballet, associant danseurs du Capitole et voltigeurs.

Anne-Marie Chouchan (30 décembre 1995)

Une nouvelle production exemplaire

Des costumes éclatants, de couleurs et de lumière, un rythme véritablement déferlant interrompu par de rares moments de poses romanesques, des chevaux, des « montres » de foire, du trapèze…Il n’en fallait quand même davantage pour marquer au seau de la réussite complète cette superbe reprise.

Robert Pénavayre (29 décembre 1995)