Revue de presse

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Sur les bancs du public
C’est de la danse ? Du théâtre ? C’est une farce. Faut rigoler.

C’est un théâtre qui aurait décrète la phrase dépassée. Qu’un geste porte l’horreur, le désir, la folie plus haut qu’une tirade. Ceux-là se sont dit qu’il y avait peu de mots définitifs : « permettez » ou « faut pas pousser » et que des corps réhabilités par l’enfance pouvaient mieux exprimer le désœuvrement, le vertige, la peur. Non. Attendez. C’est plutôt une comédie musicale. On y affirme pouvoir chanter sans être niais. Mais enfin, y-a-t’il plus dérisoire que ce « Ritorna sempre la primavera… » ?
Alors c’est un cirque cruel : le clown blanc circule en chaire roulante et souffle dans un mirliton pour faire peur aux bedits zenfants. Il finit d’ailleurs par en coincer un, par en abattre un autre. Ce qui prouve que le cirque n’est pas toujours drôle.
Résumons : toutes les ficelles du théâtre, et les plus grosses : un volatile qui descend des cintres ; un bateau en papier fendant harmonieusement la scène ; une machinerie suant, pestant, soufflant, se déglinguant à heure fixe. En plus, une partition complexe qui ne dédaigne ni le bruit d’un papier bonbon qu’on épluche, ni la mastication de ce dernier, ni la pétarade d’une mitraillette imaginaire actionnée par un enfant héros ou un vieux traitre, ici c’est la même chose. Sans parler d’un violon délicieusement désaccordé et d’un violoncelle qui fait pleurer l’institutrice nymphomane qui terrorise les bedits zenfants. Enfin quelques vieux trucs pris sous les chapiteaux.
Voyez comme la salle sursaute au tir d’un pistolet, comme elle tressaille avant le saut de la mort (exécuté du haut d’un banc), comme elle frémit que les bedits zenfants ne voient l’institutrice ôtant son habit (strict) de lumière. Cela vous parait confus ? Ca ne l’est pas. Cette sorte d’excès dont le spectacle témoigne, du début jusqu’à la fin, ne romps pas une certaine harmonie, le brouhaha s’organise et la farandole s’ordonne. Eh bien voilà, c’est de la danse ! Plus proche du tango dans sa version sombre, de la marelle dans sa version enfantine.
De la danse, à n’en pas douter : justes élans, envolées retenues. Un travail du corps mené de front avec celui des voix. Mais faut-il s’interroger autant sur la nature de Bancs ? Vouloir lui décerner absolument un genre ? Lorsque le rideau tombe, une évidence l’accompagne : il y a fort longtemps qu’on n’avait vu de tels divertissements, brouillons, amusants et inquiétants à souhait. Mais si, rappelez-vous : les tableaux vivants tels qu’en excellente compagnie on les donnait à jouer dans les salons. Bien sur, un peintre, comme autrefois, a inspiré la scène.
N’avez-vous pas reconnu ces monstres pleurnichards, malheureux et malsains ; étrangement beaux ? Balthus ? Mais pas du tout, vous n’y êtes pas. Ecoutez donc, comme à la fin, la fanfare finit par étouffer le pleur poignant du violoncelle ! C’est une farce, évidemment !

Brigitte Paulino-Neto (20 octobre 1984)

Est-ce du théâtre ? Oui, mais pas uniquement. Est-ce de la danse ? Pas vraiment, mais la chorégraphie y est partout présente.
Mais comme le Living Theatre a marque les années 1968, il est sur que la recherche menée par le Memory Movement Theatre constituera un témoignage de la création esthétique un peu délirante de cette fin de siècle.

Claude Gagnepain

Le vocabulaire utilisé se situe à mi-chemin entre le mime et la danse, et la mise en scène entre le théâtre et la chorégraphie.
Le mouvement est simple et la technique des interprètes parfaite. Rien n’est gratuit, rien n’est pour plaire, et pourtant l’imagination y est totalement libre.

Jean-Marc Colet (novembre 1984)